Grâce au partenariat entre l’École polytechnique et le réseau d’écoles Espérance banlieues existant depuis 2020, des étudiants polytechniciens ont la possibilité de réaliser leur stage de formation humaine au sein de nos écoles. Cela permet aux deux univers de se rencontrer et se faire grandir. Rencontre avec Romain, un polytechnicien qui a rejoint le Cours La Fontaine à Saint-Etienne cette année.
Pourquoi avoir rejoint une école Espérance banlieues ?
De nombreux organismes proposent des stages aux polytechniciens en première année. J’ai choisi Espérance banlieues par attrait pour l’éducation et l’enseignement bien sûr, mais également pour la dimension sociale du projet. Il est question de venir en aide à la frange de la population la plus démunie sur le plan scolaire, avec tout ce que ça implique aujourd’hui pour l’avenir de ces jeunes. Un élément décisif de mon choix a donc été l’encadrement et le suivi personnalisé que ces écoles permettent et promeuvent. C’est d’ailleurs ce dernier point qui pousse beaucoup de parents à entamer des démarches.
Dans ces écoles, il m’a aussi semblé que le maximum était fait pour donner aux élèves un cadre solide dans lequel ils puissent se développer. Enfin, ce qui a également motivé mon choix, c’est que ces écoles démystifient la culture française. Elles rendent apparentes les arcanes de la société qui entoure les élèves, pour leur permettre de s’y reconnaître sans amender leurs croyances set sans renier leurs origines.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué pendant ces quelques mois ?
J’ai beaucoup apprécié la remise des uniformes, moment solennel réunissant la plupart des principes-clés de l’école : responsabiliser les enfants, impliquer leurs parents et travailler de concert avec eux mais aussi transmettre les codes du respect vis-à-vis des personnes et des symboles. J’étais en particulier content de voir comment ils percevaient cette cérémonie, qui s’avérait avoir beaucoup de sens et d’importance pour eux. Cela dit, je ne me nourris pas tellement d’anecdotes croustillantes que du regard d’un élève lorsqu’il comprend enfin quelque chose, de cette petite fille qui part de loin et écrit de mieux en mieux, de ce garçon accédant aux secrets de l’arithmétique…
Que pensez-vous du modèle pédagogique d’Espérance banlieues ?
Des problèmes récurrents chez les jeunes des quartiers prioritaires, comme l’absence d’un parent ou la tentation de céder à l’effet de groupe, trouvent ici des solutions pratiques dans l’accompagnement personnalisé de l’enfant et de sa famille, ainsi que dans la maîtrise des effectifs : classes de 15 élèves ou moins, nombre d’adultes par élève plus élevé que dans la plupart des autres écoles. Sans avoir la prétention de connaître la réponse à toutes les questions que pose l’éducation des enfants provenant de milieux défavorisés je vois que le projet que j’ai suivi pendant quelques mois correspond à un réel besoin. Ce que j’ai entendu de la bouche des parents me conforte dans cette position.
Aux jeunes étudiants qui se poseraient la question de vivre la même expérience que vous, que leur diriez-vous ?
Je vais tenter de faire un peu mieux que le « Foncez ! » auquel tout le monde s’attend ici. L’image médiatique pour le moins extrême du réseau induit naturellement une certaine méfiance à son égard.
Je suis pour ma part très heureux d’avoir pu dissiper une partie de l’épaisse brume qui entoure le réseau. Je qualifierais même le cas d’Espérance banlieues de révélateur d’un des travers de notre société et de son rapport à l’information. Il est déconcertant de voir avec quelle facilité on peut, face à l’impitoyable tribunal de l’opinion publique, quasiment réduire à néant la capacité d’action d’un groupe tout entier, sans aucune possibilité de contrepoids de la part de ce dernier. En l’occurrence, Espérance banlieues ne propose ni plus ni moins qu’une alternative au modèle éducatif public, à des parents encore libres de juger de ce qui est bon pour leurs enfants ou non.
Il n’a jamais été question de se battre contre l’Éducation nationale, mais seulement d’en combattre les déficiences que les politiques éducatives successives n’ont su gommer. Un dossier d’une minceur remarquable a suffi à jeter l’opprobre sur dix-sept écoles d’une fantastique diversité, à l’heure où il est pourtant bien vu de combattre ardemment les amalgames quelles que soient leur forme. Il m’apparait aujourd’hui clairement que la bataille des idées est la vraie raison d’une telle croisade, et qu’il serait grand temps de mettre un terme à cette folie.
Vous souhaitez ajouter quelque chose ?
Le monde est vaste et tout le monde n’a pas la possibilité de le parcourir. En l’occurrence, Espérance banlieues m’a non seulement permis de le parcourir mais aussi d’en rencontrer les habitants. Je voudrais aussi remercier l’association pour ce qu’elle a rendu possible pendant mon stage. J’ai pu découvrir de nombreuses pédagogies pour accompagner les élèves qui rencontrent des difficultés. Les meilleurs moments de mon stage sont ceux que j’ai pu passer avec les enfants. Ces moments là font des souvenirs inoubliables.
Un grand merci à Romain pour son précieux engagement au Cours La Fontaine à Saint-Etienne. Ces expériences vécues entre des étudiants de l’Ecole Polytechnique et des élèves Espérance banlieues sont un véritable gage d’espoir et d’avenir.
Dans le cadre du partenariat avec Polytechnique, cette année, trois élèves polytechniciens ont intégré l’équipe d’une école du réseau Espérance banlieues. Découvrez les témoignages des deux autres élèves :
- Oussema au Cours La Boussole à Mantes-la-Jolie
- Luc au Cours Eric Tabarly à Toulon