Personnaliser les apprentissages afin d’accompagner au mieux nos élèves et les rejoindre au plus près de leurs difficultés, telle est l’une des dimensions majeures du projet pédagogique d’Espérance banlieues. La pédagogie personnalisée et communautaire inspire les enseignants de maternelle et de primaire du réseau et leur donne concrètement les moyens d’agir.
Initiée en France par Pierre Faure (1904-1988), la pédagogie personnalisée et communautaire – qui alterne des temps d’apprentissage individuel et de mise en commun – vise à rendre les élèves acteurs de leur propre développement, selon leurs rythmes, au fil d’une relation personnelle profonde entre l’enseignant et l’élève. En effet, sa pédagogie, éprouvée par sa longue expérience de l’éducation populaire, est une clé pour relever le défi de l’hétérogénéité des niveaux au sein des classes. Elle met aussi en valeur la capacité à coopérer des enfants dans la dimension communautaire de l’enseignement.
Une pédagogie de la personne et de la relation
Dans les écoles Espérance banlieues, le choix de limiter les effectifs des classes à une quinzaine d’élèves est l’expression d’une attention particulière portée à chaque enfant qui, chaque jour, doit recevoir des adultes la part qu’il mérite. Les petits effectifs permettent aux enseignants de mettre en place la pédagogie personnalisée et communautaire. En effet, les niveaux des élèves dans les classes sont toujours hétérogènes et la différenciation est nécessaire car chaque enfant apprend et comprend à son propre rythme.
Par ailleurs, face à un petit nombre d’élèves, l’accompagnement de chaque élève est facilité pour l’enseignant. Cette attention à délivrer un enseignement personnalisé commence dès l’arrivée dans l’école. Des tests permettent d’identifier le niveau dans lequel il peut le mieux suivre sa scolarité au sein de l’école afin de constituer des classes où peut régner une bonne émulation.
La grande richesse de la pédagogie personnalisée et communautaire réside dans la complémentarité entre le travail personnalisé, temps calme propice à la concentration et un temps communautaire, qui permet l’expression et la communication.
« Les élèves apprécient particulièrement le temps d’échange communautaire. Après un temps de concentration relativement long, principalement en silence, ils sont heureux de pouvoir présenter ce sur quoi ils ont travaillé, de partager leurs découvertes, ce qu’ils ont apprécié, ou encore les difficultés rencontrées. Leur enthousiasme est souvent communicatif et donne envie aux autres de faire telle ou telle activité. Ce partage crée une émulation positive et vertueuse au sein de la classe ! » raconte Blandine, enseignante en CE1-CE2 au Cours Colibri à Reims.
Des élèves autonomes et responsables
Il s’agit d’une pédagogie respectueuse du rythme d’apprentissage de chaque enfant. Inspirée de la méthode Maria Montessori, elle implique la manipulation et favorise ainsi la recherche et l’autonomie. L’élève choisit son travail et son matériel dans une certaine progression imposée par le maître.
« Cette pédagogie a pour avantages de donner aux élèves le goût du travail bien fait, de favoriser leur concentration, d’attirer leur curiosité vers des activités constructives et de développer le langage, afin que les enfants soient véritablement acteurs leur apprentissage », explique Marine, enseignante en maternelle au Cours La Cordée à Roubaix. Motivé car acteur, l’élève devient ainsi, petit à petit, plus autonome et responsable, tout en prenant confiance en lui.
« La pédagogie personnalisée et communautaire est un formidable outil pour responsabiliser les élèves : dans un cadre précis, les élèves se déplacent dans la classe et choisissent les activités qui leur permettront de progresser et de valider l’acquisition d’une nouvelle compétence », explique Catherine, enseignante en CP au Cours La Cordée à Roubaix et chargée de la formation des enseignants du réseau à cette pédagogie.
L’un des outils-clés de la pédagogie personnalisée et communautaire est le plan de travail, véritable « route balisée » qui guide les élèves dans leur progression et leur permet d’être autonomes dans leurs apprentissages. Les enfants ont chacun un plan de travail. Grâce à ce dernier, les élèves fixent leurs objectifs de progression. Ils choisissent, progressivement, les ateliers sur lesquels ils souhaitent s’exercer et qui leur permettront de valider l’acquisition de compétences.
« Il s’agit de mettre les enfants en marche tout en essayant de susciter leur propre réflexion, leur propre prise de conscience. Telle est bien notre pratique : en agissant et le plus possible par lui-même et de lui-même et avec son corps comme avec son esprit. »
Pierre-Faure
La posture de l’adulte
La pédagogie Pierre-Faure est une pédagogie du libre choix pour l’enfant. Cependant, cela reste un travail très structuré, à la fois dans le rythme de progression et dans le travail proposé, grâce à la préparation réalisée par l’enseignant en amont. L’enseignant est un véritable gardien de l’environnement de travail. Il orchestre les différents temps et veille au maintien d’un climat propice à la concentration.
« Pendant le temps de travail individuel, j’observe chaque élève. Je peux les guider afin qu’ils s’entraînent sur des points à améliorer. » raconte Blandine.
L’enseignant doit considérer l’enfant dans sa globalité en prenant en compte son histoire, sa culture et son rythme d’apprentissage. La façon de communiquer de l’enseignant est alors primordiale : il doit être doux, patient et chuchoter. Sa posture est également essentielle : il doit se mettre à la hauteur des enfants, assis par terre, à genoux ou sur une chaise.
Pour résumé, le professeur est là pour accompagner, guider, encourager, et aider à faire seul !
L’établissement d’un cadre spatio-temporel sécurisant
La mise en place de la pédagogie personnalisée et communautaire nécessite une adaptation très concrète de l’emploi du temps et un aménagement approprié de la salle de classe.
En effet, une attention particulière est portée à l’environnement. L’équipe pédagogique met en place un cadre épuré afin de favoriser le bien-être et la concentration. Ce cadre doit résonner comme une invitation à maintenir l’ordre dans la classe, pour l’enseignant comme pour les élèves.
L’agencement de la classe est très significatif afin de permettre le déplacement et favoriser l’accès au matériel ou aux documents.
« Les élèves évoluant de manière autonome dans la classe. Il était nécessaire d’aménager la salle avec soin afin de faciliter les déplacements. Créer des espaces de rangement où les activités sont disposées à hauteur d’enfant, par thème et par ordre croissant de difficulté. Une telle organisation permet aux élèves de trouver facilement leurs repères. » explique Blandine, enseignante en CE1-CE2 au Cours Colibri à Reims.
A vous de jouer !
Nous vous proposons les exercices suivants construits autour de la manipulation et destinés aux enfants de Grande section jusqu’au CE2. Prenez le temps de montrer une première fois chaque exercice à l’enfant en lui exprimant votre intérêt pour l’atelier. Puis, laissez-le le découvrir par lui-même, en lui donnant l’opportunité de réaliser l’exercice autant de fois qu’il le souhaite.
Développer la concentration (jusqu’au CE2)
Préparez plusieurs petits pots opaques (ex : boîtes à épices peintes). Dans chacun d’entre eux, introduisez : des clous, des billes, du sable, des allumettes… Ensuite, invitez l’enfant à deviner par la manipulation, ce que recèle chacun des pots.
Apprentissage de la lecture (Grande section – CP)
Introduisez dans une petite boîte 15 papiers sur chacun desquels est inscrit un mot (ex : table, tapis, mur, chaise, fourchette…). Mettez à disposition un petit rouleau de scotch. L’enfant pioche ensuite un mot, le lit et colle le papier sur l’objet désigné.
Mathématiques (Grande section – CP)
Préparez un panier contenant des petits papiers, sur chacun desquels est inscrit un chiffre. Dans un autre panier, préparez des billes. Invitez ensuite l’enfant à piocher un papier, le poser sur la table et y mettre à côté le nombre de billes correspondant.