Une innovation pédagogique n’est pas forcément une nouvelle méthode, mais une approche éclairée par une meilleure compréhension du cerveau. Elle permet aux professeurs de mieux répondre aux besoins des élèves, en ancrant les leçons dans le réel et rendant l’élève acteur de ses apprentissages. Par la manipulation concrète, l’élève comprend d’abord une notion de manière tangible avant de l’abstraire. 

Nous vous proposons, dans les lignes qui suivent, de retourner quelques instants sur les bancs de l’école en vous immergeant dans un cours de français.

Commençons par une saynète pour comprendre ce qu’est le complément d’objet direct et son fameux accord avec le participe passé. Le professeur demande à un élève de tirer une chaise. L’élève se lève et tire la chaise :

– Quelle est votre action ? – Tirer.

– Qui fait cette action ? – Moi.

– Sur quoi porte votre action ? – Sur la chaise.

La chaise est donc l’objet sur lequel se porte l’action (du verbe). Nous pouvons dire que le complément d’objet direct indique sur quoi ou sur qui porte l’action du verbe.

Après plusieurs saynètes en variant la présentation du complément d’objet direct, nous pouvons présenter cette phrase : 

– Où sont tes lunettes ?

– Mes lunettes, je les ai perdues.

Pourquoi « perdues » avec un « es » à la fin ? Parce que l’action du verbe se porte sur le nom commun « lunettes« , féminin pluriel. Et au moment où je parle, je sais que cette action porte sur cet objet (Mes lunettes, je les ai perdues.) 
Dans le premier exemple (je tire la chaise), au moment où je parle, je ne sais pas encore sur quoi se porte mon action lorsque je prononce le verbe « je tire…« . En revanche, lorsque je dis « la chaise, je l’ai tirée« , je sais sur quoi se porte l’action, donc j’accorde le participe passé pour marquer le féminin. 

La pédagogie du sens conscient, ici en exemple, est une pédagogie qui fait appel à la raison par l’expérience sensible, menant progressivement vers des notions plus abstraites. Dans notre saynète, l’élève a expérimenté physiquement l’action avant de s’en faire une représentation. Cela permet au cerveau de se représenter les choses, amenant l’enfant à comprendre et à abstraire progressivement plutôt que d’appliquer mécaniquement la règle.

Outre l’application de cette pédagogie du sens conscient au sein du réseau, nous nous appuyons sur des démarches combinant une approche personnalisée des élèves et une dynamique de classe, comme la pédagogie de Maria Montessori. Cette approche permet notamment de gérer l’hétérogénéité d’une classe tout en individualisant le suivi ; la restitution devant tous permet d’accroître la confiance en soi et de reconnaître le travail des autres.
Au-delà de faire grandir la connaissance, nous mettons l’élève en situation de développer ses capacités de coopération avec le groupe.

Pour renforcer ces « soft skills », (capacités à se comporter et à être dans une situation) les élèves appartiennent non seulement à une classe mais aussi à une équipe : regroupés en âges différents, ils vivent ensemble des temps hors-classe tels que déjeuner ensemble, rendre service, organiser des jeux sous la conduite d’un élève, responsable d’équipe. Faire avancer les plus jeunes dans l’autonomie permet également une progression personnelle pour les plus grands, les faisant accéder peu à peu à la découverte du sens des responsabilités.

Nous nous efforçons également, au cœur de la vie des écoles, d’appliquer une « discipline positive » : valoriser les points forts des élèves, les associer à la définition des règles, formuler des limites toujours compréhensibles. En encourageant les élèves à donner le meilleur d’eux-mêmes et à prendre conscience de leurs responsabilités, nous observons des progrès significatifs chez eux. Cette approche incite les enfants et les jeunes à réfléchir à ce qui est bon et juste pour tous en comprenant pleinement les règles plutôt qu’en les appliquant de manière aveugle.
Toutes ces pédagogies sont orientées par une vision de l’homme considérant chacun comme une personne, plutôt que seulement comme un individu, et dont l’éducation vise à développer toutes ses dimensions (intellectuelles, culturelles, sociales, biologiques, etc).

La finalité et les objectifs pédagogiques portés par le réseau Espérance banlieues sont décrits dans un document de référence : le projet pédagogique. L’ensemble des équipes éducatives du réseau s’y réfèrent pour donner l’unité d’action dans chaque école et collège Espérance banlieues. La formation des professeurs permet de nourrir chaque école dans cette dynamique.

Chaque année, deux temps de formation sont organisés par le réseau en juillet et pendant les vacances de la Toussaint. Ils permettent de transmettre aux professeurs le projet Espérance banlieues en fonction de leur expérience du métier d’enseignant : organiser sa classe et prévoir la progression des premières périodes pour les professeurs débutants ; déployer la méthode individualisée et communautaire pour les plus expérimentés ; s’interroger sur sa posture d’éducateur ou sur la transmission de la culture française pour tous les parcours.

En complément de ces formations, un forum pédagogique est organisé pour partager le florilège des bonnes pratiques du réseau, illustrant la mise en œuvre des pédagogies fondatrices dans nos écoles. Cette année, douze bonnes pratiques ont été proposées aux professeurs du réseau par leurs pairs.

Régulièrement, nous rencontrons d’autres réseaux d’écoles pour enrichir notre pratique. Ce printemps, nous sommes allés à Strasbourg visiter une école IB, « International Baccalaureate ». L’approche anglo-saxonne nous inspire sur les rythmes d’apprentissages et sur le travail collaboratif et transversal en projet